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Insulte gratuite ?

Insulte à l'hôpital, où est la sécurité ?

Hier soir, je me suis fait insulter. On a l’habitude dans ce boulot à force… Triste à dire non ? Cela s’est donc passé hier durant mon tour du soir avec à la prime plusieurs autres soucis dont un plus grave.

Insulte, « normale »

Durant mon tour du soir, 18h, je passe de chambre en chambre pour certains médicaments, injecter les anti-coagulants et voir si tout va bien. J’ai un patient vomissant partout mais les aides-soignantes vont vitre le prendre en charge et s’occuper de lui, merci les filles ! Car à côté je gère surtout une fin de vie avec une de mes patientes qui malheureusement va nous quitter dans l’heure qui va suivre. La famille est présente donc la fille restant à son chevet. C’est souvent dur à vivre ce genre de chose, même pour nous et même si on côtoie souvent la mort dans le service, chaque cas est différent et on ne peut rester insensible même si on est habitué.

Mais je n’avais pas parlé d’insultes ? Si. Cela viendra de la chambre d’après. Le fils de la patiente, arrivé depuis 48H dans le service et dont on m’a beaucoup parlé en transmission (si vous voyez ce que je veux dire… D’ailleurs notons que ce jour là, monsieur est rentré dans le poste de soin sans frapper à la porte alors qu’on était en pleine transmission et est resté là à poser diverses questions… Sacré toupet. Depuis j’ai placardé une grosse afficher de défense d’entre sur la porte ^^) et que donc ce monsieur commence à crier en arrivant dans la chambre de sa mère. Motif ? Sa maman venait d’être installé au lit.

Rapidement pour vous situer une chose : la maman n’a pas l’appui autorisé sur une jambe et ne peut se déplacer, elle est atteinte de la maladie d’Alzheimer à un stade avancé, maladie que son fils a l’air d’avoir du mal à accepter. La petite dame cherche souvent à se lever et risque donc souvent une chute.

Criant donc en sortant de sa chambre, il me voit dans le couloir et demande des comptes : « Pourquoi ma mère est coucher pour le diner à 18H, ce n’est pas normal, on est où ici, elle peut manger normalement ! » Dans le fond, je cautionne un peu ce qu’il dit. Pourquoi coucher un patient si tôt ? Il est vrai qu’on peut quand même les laisser au fauteuil, il a raison. Mais malheureusement, on n’est pas une unité d’Alzheimer et on n’aurait jamais dû recevoir sa maman car on n’est pas adapté pour. Elle a été couché car madame n’arrêtait pas de se lever de son fauteuil et que le soir l’aide-soignante ne pouvait rester près d’elle toute la soirée, elle avait aussi son tour à faire. Alors certes, on est dans un cas de facilité et qu’on ne connaît pas forcément encore ses habitudes à elle (et à lui). On aurait pu même s’arranger avec lui pour installer autrement sa mère le soir et qu’il reste près d’elle . Mais sachant qu’il avait déjà fait marcher sa mère plusieurs fois alors qu’elle n’a pas l’appui autorisé, on doute un peu de lui. Mais on aurait toujours trouvé un moyen d’arranger tout le monde.

Sauf que là, le problème est surtout que le fils hausse le ton et crie un peu trop fort. Je lui ai donc demandé 5 fois de suite de parler plus bas et surtout de ne pas me parler ainsi. Non mais c’est vrai quoi, on n’est pas aux ordres de tout le monde. C’est énervant de se faire dire comment faire notre boulot, je ne vais pas sur votre lieu de travail pour vous dire comment faire moi, si ? Il ne se calme pas, traite les aides-soignantes d’incompétente, etc. Je lui explique donc pourquoi ce soir elle est au lit, il critiquera alors le fait qu’on soit si peu de personnels… Ça j’y peux rien et ça changera par monsieur. Ne comprenant toujours pas, il me sortira également : « vous, vous avez fait la formation sur le stress ». Oui, ça énerve que je reste si calme face à lui. Par contre, je suis un peu étonné sur le coup qu’il connaisse nos formations… Continuant son langage si particulier, j’aurai enfin droit à un jolie « con » mais surtout à un « gros con ». La classe, il sait enfin qui je suis.

Mais mon problème n’est pas l’insulte ou autres, je m’en contrefous. Même si je lui rappelle que je ne suis pas forcément là pour me faire insulter. Mais mon problème est la chambre à côté qui je rappelle est une dame en train de mourir et dont la fille voudrait bien avoir la paix. C’est surtout ce point-là qui va m’énerver. Je lui ai donc dit ma façon de penser (sans l’insulter ou le tutoyer comme il la fait) en lui rappelant qu’on est dans un hôpital, s’il voulait des explications on pouvait le faire mais de façon posée et que je suis obligé de lui signaler qu’une dame est en train de mourir dans la chambre à côté et que par ce fait il devrait franchement se taire. Je pensais lui faire un petit électrochoc sur cette dernière phrase, il n’en est rien, il ne se calmera pas.

Au lieu de rentré dans son jeu, m’énerver inutilement et me voir sanctionner (car oui c’est souvent le patient et la famille qui ont raison et c’est à nous qu’on dira les choses, c’est lassant…) je préfère contacter l’administrateur de garde, qui sera la directrice de l’hôpital, et un médecin pour qu’ils interviennent. Durant mon entretien téléphonique, la fille de la patiente de la chambre à côté ira le voir pour lui demander de se calmer mais face à elle et ses larmes, il ne l’écoutera pas… La directrice et le médecin resteront une heure à s’expliquer. Bien entendu, le fils fut surpris de les voir débarquer et est resté vraiment calme en disant bien entendu qu’il ne s’était pas énervé et ni insulté le personnel soignant. Quel courage !

Il lui sera alors expliqué qu’il doit se comporter en tant que fils, que les décisions se prenaient par l’équipe qui était des professionnels de santé, ils ont essayé de lui faire comprendre le comportement de sa mère du fait de sa maladie mais je pense qu’il est encore dans un déni face à ça et voudrait que sa mère redevienne autonome comme elle était avant….

Dans l’histoire, j’avais donc surtout énervé et pensé sans arrêt à la chambre d’à côté… Je comprends pas certaines personnes, franchement. Merci quand même à la directrice de l’hôpital pour son intervention et ce qu’elle lui a dit, j’admire ses dires.

A propos de Thibault Deschamps

Infirmier 2.0 - Je partage tout et rien mais cela n'engage que moi. Note: Article rédigé en collaboration avec l'entreprise citée

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2 commentaires

  1. Billet très réaliste sur les pressions qu’on peut recevoir de la part des entourages divers et variés (outre hiérarchique).

    Quand on est à l’hôpital : « on ne doit pas avoir mal » le zéro douleur obligatoire, on doit avoir un personnel 100% compétant dans toute les pathologies, on doit avoir le matériel nécessaire et dessuite (même si c’est pas toujours justifié), la notion de temps et temporisation est insupportable.

    Il est vrai que le problème qui peut choquer est la personne couché à 18h devant le repas, c’est une organisation de service chez nous les gens sont servi à 19h15…mais ça serait encore se tromper de problème…

    Le vrai pb que tu soulignes est le positionnement du fils qui fait levé sa mère alors que c’est contre indiqué (et qui dira certainement ne pas avoir été informé; entre annoncer et entendre il y a un fossé), mais ce coté « usagers » ayant tous les droits, même celui d’outre passer les consignes en argumentant tout savoir mieux que toi/nous.

    De plus en plus on nous place vers un rôle de policier plutôt que soignant, rôle que je refuse. Le coté « je signe une décharge » et qui après se retourne « car il savait pas » trop facile de jouer sur plusieurs tableaux.

    On peut faire toutes les théories de considération de la personne, de gestion etc…un con est un con…ne pas respecter une autre usager qui pleure…montre son hermétisme et son positionnement.

    Je te souhaite bcp de courage et au plaisir de lire d’autre article.

    • Le plus drôle fut surement le lendemain où il ma demandait à 20H quand est ce que je comptais coucher sa maman.
      Et le surlendemain avec ma collègue, à 18H où il est venu lui dire de coucher sa mère.

      Je sais pas… Il fait exprès ?

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